L’ Association Nationale des Technologistes Biomédicaux du Burundi accorde une place de choix au secteur du laboratoire en ce qui est du traitement des maladies mais trouve que ce secteur, au Burundi, fait face à mille défis presque sur tous les plans: organisationnel, infrastructures, recherches, académiques , ressources humaines etc. La première activité de cette association relative à la célébration de la journée internationale du biotechnologiste , célébrée chaque année le 15 avril, a été une conférence animée ce mercredi du 20 avril 2023 pour dégager les défis
L’insuffisance du personnel dans les formations sanitaires en quantité et en qualité est le premier défi qu’évoque Emmanuel Hakizimana, président et représentant légal de l’ ANTEBBU. Des centres de santé sans professionnel de laboratoire. Selon les normes et standards des laboratoires du Burundi, explique le biotechnologiste Emmanuel Hakizimana, un centre de santé doit avoir au moins 2 professionnels de laboratoire de niveau A2 et deux personnes d’appui ; un hôpital de district devrait avoir 4 professionnels de labo de niveau A0, 4 de niveau A2 et 2 personnes d’appui ; un hôpital régional devrait compter 12 professionnels de labo de niveau A0 et 3 de niveau A2 ; quant à un hôpital national, on devrait avoir 52 professionnels de labo A0 ou plus , 8 de niveau A2 et 6 personnes d’appui.
Les professionnels de laboratoire de niveau Baccalauréat/licence n’ont pas d’accès à la formation du 2ème cycle (master) en sciences de laboratoire sur le territoire burundais, un autre grand défi. Les raisons semblent claires pour ce patron de l’ANTEBBU. « Nous n’avons pas d’universités, ici au pays, qui forment les professionnels de laboratoire après le Baccalauréat » , déplore Emmanuel Hakizimana. Selon lui, celui veut continuer ses études dans ce domaine, doit chercher ailleurs. Les conséquences sont énormes. Sans les académiciens du domaine, les travaux de recherches deviennent impossibles. Sans enseignants du domaine, hautement l’éducation restera toujours douteuse.
De tertio, le président de l’ANTEBBU souligne les locaux de la majorité des laboratoires sont hors normes et n’offrant pas un carde sécurisé, adéquat et optimal pour le travail du personnel de laboratoire. « Un laboratoire du CDS devrait couvrir une surface 74 m² ; un labo de l’hôpital de district 152m², et un laboratoire d’un hôpital régional, une surface de 308m² », explique-t-il.
Selon Emmanuel Hakizimana, aucun laboratoire du Burundi n’est accrédité. Et de déplorer que rien n’a été fait malgré le financement l’Association Internationale de Développement, IDA en sigle, à travers projet régional de mise en réseau de Laboratoire de santé publique en Afrique de l’Est. « C’est dommage qu’on doit se rendre dans d’autres pays ».
La répartition du budget ignore le secteur. « Le laboratoire burundais ne dispose pas de ligne budgétaire » , un autre défi non négligeable. Le président de l’ ANTEBBU dévoile que l’achat du matériel et consommables des laboratoires des structures sanitaires est conditionné par le reste après avoir vidé les besoins en médicaments et en autres articles nécessaires.
Pour lui, tous ces défis gagnent du terrain car les professionnels de laboratoire du Burundi ne disposent pas d’un ordre professionnel pouvant réguler et plaider pour leur profession. « Ridicule que le Burundi est le seul pays de l’EAC qui ne dispose pas cet organe ». Et de poursuivre, les services ou départements de laboratoire sont majoritairement dirigés par les non-initiés en la matière, source de la mauvaise gouvernance du domaine. « Les problèmes qui entravent le développement des services de laboratoire en Afrique sont essentiellement dus à un manque de leadership pour le laboratoire au niveau des ministères de la santé« , s’appuie-t-il sur les déclarations de l’ex ministre burundais de la santé Dr Sabine Ntakarutimana, en 2014.
Le laboratoire est un outil de diagnostic incontournable sans lequel, la médecine serait aveugle. « On ne peut pas traiter une maladie qu’après diagnostic. Pourquoi alors laisser derrière ce secteur combien important ? », lui emboîte le pas Émile Ntirampeba, vice-président de l’ANTEBBU. Pour lui, les laboratoires sont les temples du savoir et du progrès de la science. « La plupart des découvertes ayant connu de succès ont eu lieu dans les laboratoires« , martèle-t-il. Ce professionnel de laboratoire trouve qu’investir dans les laboratoires ouvre la voie à l’avenir meilleur d’un pays. Et d’ajouter, les pays qui le font sont ceux qui dirigent la recherche scientifique, détiennent la connaissance et font avancer la science et technologie pour le développement humain.
L’ANTEBBU propose des solutions
Pour rectifier le tir, l’Association Nationale des Technologistes Biomédicaux du Burundi adresse entre autres une série de propositions au gouvernement. « La promulgation du projet de loi portant et fonctionnement des ordres professionnels manquant ; profiter la date du 15 avril pour instaurer annuellement une journée nationale de réflexion sur l’avenir du laboratoire au Burundi pouvant réunir les intervenants du domaine pour rebâtir notre chantier. Aussi placer les fonctionnaires de laboratoire dans les postes de direction des services ou départements en rapport avec le laboratoire et incorporer dans les équipes cadres des districts sanitaires ou provinces sanitaires des technologistes biomédicaux ; permettre à ceux qui terminent le premier cycle de l’université de continuer pour le master et doctorat.« , liste le président de l’ANTEBBU.
Pas de santé privée, il demande la redynamisation de relations entre le ministère ayant la santé publique dans ses attributions et les associations professionnelles pour trouver ensemble des solutions.
Signalons qu’à côté de la conférence de presse animée, d’autres activités prévues dans le cadre de la célébration de la journée internationale du biotechnologiste, sont l’ouverture officielle d’une microfinance GROTEBBU-UMWIZA ; campagne de dépistage gratuit de la population de Rumonge pour différentes maladies chroniques ainsi que le don volontaire du sang . Et cela dans différentes provinces du pays.
Gérard Haburanimana